- Page en construction - Contribuez via le forum Valousien Une rapide inscription et vous pourrez publier ou seulement communiquer à l'auteur de ce site tout témoignage ou document -
Vouivres, Guivres et autres Dragons
1818, Désiré Monnier nous dresse son portrait
La signification de Vaivre me paroît difficile à déterminer : ce terme doit être celtique ; ce qu’il a de particulier, c’est d’appartenir à des localités où j’ai rencontré des traces du paganisme. Il paroît être la même chose que Vouivre, mot provincial qui, dans l’opinion du peuple, est le nom d’une espèce de serpent ailé, immortel, qui habite les ruines des châteaux et des couvens. Il y a des paysans qui assurent l’avoir vu traverser les airs en forme de barre de feu, et qui disent que quand la Vouivre veut boire à la source d’un ruisseau et dans les citernes elle dépose sur le rivage le diamant qu’elle a sur le front. Heureux, l’homme adroit qui, dans ce moment où l’animal merveilleux ne voit pas clair (car le diamant est son œil), saisiroit ce talisman : sa fortune seroit faite, il seroit le plus puissant des hommes ! Cet animal est connu dans le Blason sous le nom de Givre, et on l’y représente tenant à sa gueule un enfant qu’il dévore. Aussi l’opinion vulgaire est que la Vouivre est un être fort méchant, et sa malignité est passée en proverbe, car on apostrophe de ce nom les femmes qui n’ont pas la douceur en partage. La Givre ou Vouivre est une espèce de drac ou dragon, autre animal diabolique, emblème du mal. Au surplus, on peut considérer la Vouivre comme une fée déguisée, et l’on sait que les fées ne sont pas en grande réputation pour l’aménité de caractère.
Désiré Monnier, Essai sur l’origine de la Séquanie, 1818, p. 174.
La vouivre est connue partout dans nos villages :
... je ne parlerai pourtant pas de toutes les Vouivres qui visitent les donjons délabrés de la province, ce serait trop entreprendre ; car il faudrait citer celle qui, sur la montagne de Dung, village voisin de Montbéliard, doit être fière d'avoir survécu à la défaite d'un dragon qui désolait les chrétiens du pays d'Ajoie ; celle de Cicon, installée dans une tour assez célèbre au temps des croisades du treizième siècle, tour qui retentissait des noms jusqu'àlors inouïs des ducs d'Athènes et de Thèbes, et protégeait les amours romanesque du comte Etienne et de Blandine ; celle de Moutier-Haute-Pierre que son oeuil d'escarboucle, son glode lumineux précède toujours d'une coudée ; et que l'on a vu quelquefois volant des cascades du Siratu à la montagne du Moine, ou se désaltérant aux sources du Puits à l'Ermite et de la Chaudière d'Enfer ; celle de Valempouilière à laquelle une association foudroyée par un prédicateur, tenta mais vainement d'enlever son trésor ; celle de Morond qui poursuivit un jour le brave Dole jusqu'au bas de la colline, afin de le châtier d'une entreprise aussi téméraire et dont ce malheureux ne fut délivré que par le secours de Notre-Dame, à qui sa reconnaissance érigea bientôt un monument (Dole abandonnant sa pioche à la vue de la Vouivre en colère, et descandant la côte d'un pas précipité et le coeur glacé de frayeur, se voua à la Sainte Vierge, et tomba évanoui. J'ai vu l'oratoire qu'il a fait bâtir à cette occasion, dans le lieu même où il avait été délivré de la Vouivre.) ; celle qui de Mirebel à Montmorot, antique séjour des illustres comtes de Vienne qui faisaient des chemins ferrés dans une seule nuit (C'est ce que l'on dit du chemin de Jean de Vienne, attribué aussi au diable, et dont on trouve les vestiges abandonnés dans la côte de Pannessières, arrondissement de Lons-le-Saunier) ; celle qui partage sa vigilance entre le manoir que Tristan de Chalon érigea sur Orgelet pour le protéger, et le vaste château de la Tour-du-Meix où vinrent s'égayer les moines de Saint-Claude ; celle qui a fixé son impérissable résidence dans la fameuse tour de Dramelay d'où sortirent jadis connétable de Bourgogne et grand maître du Temple ; celle qui du haut du château de l'Aigle, autefois protecteur de la chartreuse de Bonlieu et du prieuré de Saint-Vincent, domine une contrée pittoresque toute peuplée d'esprits sauvages et familiers ...
Désiré Monnier, Du culte des esprits dans l'ancienne Séquanie, Imp. F. Gauthier, Lons-le-Saunier, 1834.
Pays Valousien : archéologie histoire mémoire légendes poésies
Optimisé pour le navigateur Firefox avec Javascript 1.5